Aux côtés des habituels Bikutsi et Makossa, Donny Elwood, chanteur- compositeur et guitariste apparaît comme un ovni dans la tradition musicale camerounaise. Ses chansons ne sont pas faites pour danser, mais seraient plutôt des “chants à penser”. Ce gavroche des faubourgs de Yaoundé (Cameroun), qui gueule à qui veut bien l’entendre : “On m’appelle Monsieur alère, Tonton Misère”, la guitare en bandoulière et son indécollable chapeau crânement enfoncé sur sa tête, il manie la langue française avec autant de dextérité qu’un chirurgien son scalpel. Mix de Brassens, de Dutronc et de Francis Bebey, cet enfant du colonialisme transforme les mots qu’on lui a appris en des armes redoutables, renversant les préjugés.
Dans ses chansons, il accule l’Homme jusque dans ses dernières défenses : corruption, impuissance, misère… Tout est objet à plaisanterie et rien n’échappe au regard acerbe de Mr Elwood, de son vrai nom Ella Owoudou Albert Dieudonné. Né en 1968 à Ebelowa (Sud-Cameroun), ce jouisseur des mots a aussi été comédien (Les Nul’ Art) et réalisateur, avant de se lancer dans la chanson, où là encore, il met à profit son plaisir de jouer. Sur scène, il exulte, il s’amuse, il échange avec le public…
Pygmée par ses grands-parents, Donny semble avoir hérité de son don pour la parabole des griots de sa région, les joueurs de mvet (sorte de guitare avec des calebasses comme caisse de résonance), qui utilisent les contes pour ramener hommes et femmes dans le droit chemin. Lui pourtant ne prêche pas la bonne parole, il se contente d’observer le monde. Et nous, on se régale à l’écouter nous raconter l’histoire du Cousin militaire : “Heureusement que j’ai mon cousin militaire. Quand il touche son salaire, me donne mon argent de bière. Et moi je fonce chez ma rombière, toute la nuit on s’envoie en l’air.